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Présidence de l’Union Européenne: ne serait-il pas temps de faire changer les mentalités ?

Nous sommes enfin en 2022,  l’ouverture d’une nouvelle année, qui sera le théâtre de plusieurs grandes échéances électorales en France et dans le monde, mais cette année, marque également le début, pendant  1 an, à compter du 1er Janvier et pendant 6 mois, de la présidence française de l’Union Européenne. Il s’agit d’une présidence tournante : chaque membre prend la présidence pendant 6 mois, la présidence sortante étant Slovène. Ainsi, pendant 6 mois, le gouvernement français, présidera le Conseil de l’Union Européenne. Emmanuel Macron, a ainsi annoncé quelques chantiers prioritaires qu’il veut mettre en avant durant cette présidence, dont notamment : la protection des frontières, le climat, la refonte des critères de Maastricht , l’établissement d’un salaire minimum européen  ou encore la création d’une armée européenne.

Des propositions veines

En soit, des propositions veines et qui ne font que répéter en boucle ce qui est promis depuis des années, une forme de remake de la sauce fédéraliste d’Emmanuel Macron qui nous est servie depuis 5 ans, sauf que la plupart ne sont pas réalistes, preuve en est qu’aucune d’entre elles n’a su être appliquées. Le véritable problème de ces propositions farfelues, c’est qu’elles ne font que desservir les populistes eurosceptiques.  Le 23 Juin 2016, au Royaume-Uni, ce n’est pas la peur de l’Union Européenne qui s’est exprimée à travers les urnes, c’est la peur du fédéralisme européen, tant que les dirigeants ne l’auront pas compris, le populisme sera toujours à son plus haut niveau (aujourd’hui, 25 % des députés européens appartiennent à des partis eurosceptiques.). Pour autant, le plus grand danger, pour les Français comme pour tous les Européens, ce sont eux, les eurosceptiques, qui se nourrissent des faiblesses de l’Union Européenne pour inciter à en sortir, cependant, cette rhétorique semble de moins en moins prendre en tous cas en France, puisque 63 % des français veulent rester dans l’Union Européenne.  Contrairement à ce qu’affirment ces partis,  l’Union Européenne rapporte bien plus que ce qu’elle nous coûte (voir tous les projets financés par l’Union Européenne), sortir de l’Union Européenne ou de l’Euro serait un désastre.

Le populisme, le plus grand danger

Sortir de l’Union Européenne, c’est donc une pure folie, mais nous ne pouvons considérer que l’Union actuelle soit une réussite, bien au contraire, et les propositions d’Emmanuel Macron et des autres fédéralistes ne sont que l’accumulation de pansements sur une même plaie. Néanmoins, cette volonté de faire sauter tous les pays dans le train de l’Europe fédérale ne fait qu’engendrer de la peur et du rejet de la part des populations qui donnent naissance à l’extrémisme. Une Union Européenne pérenne ne pourra être qu’une Union totalement repensée.  Cette Union Européenne, doit être mieux harmonisée avec plus de politiques communes (notamment dans le domaine économique) mais en même temps elle doit mieux respecter les souverainetés de chaque nation.

La meilleure réponse au populisme, c’est l’Europe à plusieurs échelles

Tout d’abord, il faut arrêter de penser qu’une Europe des 27 peut fonctionner.  A l’heure où Emmanuel Macron souhaite élargir l’Union Européenne aux Balkans, nous pouvons déjà observer les limites d’une Union comportant tant de pays : l’immobilisme. Il est donc impératif de recentrer l’Union Européenne sur les pays de la zone euro, puisque ce sont les seuls qui sont pleinement intégrés. Pour ces pays, il faut tendre vers une harmonisation fiscale au niveau de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu, de la TVA, etc…  Il faut également un gouvernement économique de la zone euro, avec à sa tête un gouverneur, qui parlerait, à l’international, au nom de la zone euro. Nous pourrions même aller encore plus loin, Laurent Wauquiez prône le retour à « une Europe des six », si l’idée est un peu radicale, nous pourrions très bien imaginer une union très forte entre les six pays fondateurs de l’Union Européenne qui irait encore plus loin dans l’harmonisation.  Ce qu’il faut absolument, c’est plusieurs Unions au sein de la même Union, la fameuse « Europe à plusieurs vitesses ». Croire que le projet européen peut être accompli en amenant 27 pays dans la même direction, c’est se mettre le doigt de l’œil, considérer qu’une Europe élargie aux Balkans voire à la Turquie fonctionnera mieux, c’est aussi se mettre le doigt de l’œil, mais très profondément.

Une Europe compétitive

Deuxièmement, il faut que l’Union Européenne devienne réellement compétitive, et pour cela, il faut refonder complètement le droit européen de la concurrence, aujourd’hui, beaucoup trop restrictif. Le meilleur exemple est celui de la fusion avortée : Alstom-Siemens.  Le droit européen de la concurrence, ne permet pas aujourd’hui l’émergence de géants européens, puisqu’il est pensé au niveau européen (et non international). Etonnement, cela ne fait pas partie des priorités du nouveau président de l’Union Européenne, alors que la liste de son parti portait ce projet en mesure phare sur le plan économique.  

Une harmonisation sociale

De plus, il faut revoir en profondeur la directive des travailleurs détachés, avec une règle très simple : les travailleurs doivent pays les cotisations sociales du pays dans lequel ils travaillent (et bénéficier de la protection sociale prévue par ces cotisations). Il faut revoir le pacte de stabilité et de croissance, et aller encore plus loin, Emmanuel Macron veut revenir sur cette disposition, cela dit, rien d’étonnant venant de la part du Président qui a fait explosé les déficits publics pendant 5 ans…  La règle doit être simple, il faut une règle d’or budgétaire pour chaque pays européen, cette règle d’or doit être intégrée dans la Constitution de chaque pays membre de la zone euro. Nous ne pouvons pas nous contenter d’un déficit à 3 %, il faut viser le plus haut possible. Des dérogations pourraient être accordées en cas de force majeure, comme c’est le cas actuellement, sans pour autant sombrer dans la folie actuelle, avec un budget de 2022 à 8 % de déficit alors que rien ne le justifie.  L’autre possibilité de dérogation, ce serait d’accorder à un pays de creuser temporairement le déficit, si et seulement si, cela pour objectif de baisser la fiscalité ou les charges des entreprises, afin de redonner de la compétitivité au pays. Et enfin, il faut qu’Emmanuel Macron arrête avec cette volonté absurde d’imposer un SMIC européen, alors que les disparités en matière de salaire minimum au sein de l’Union Européenne sont extrêmement forts : 323 € en Bulgarie ; 1626 € en Belgique…

l’Europe politique

Concernant l’aspect plus politique, il est urgent de revenir sur le principe d’unanimité entre les pays membres et imposer un principe de majorité. Il faut que les élections européennes soient transnationales et non plus nationales (et donc que les citoyens européens  votent directement pour des partis politiques européens et non plus pour des partis nationaux qui adhèrent à un parti européen). Il faut que le Président de la Commission Européenne soit élu par le parlement européen.

Il n’y a pas une culture européenne mais des cultures eurpéennes

Et enfin, sur le plan culturel. Récemment, pour inaugurer la nouvelle année, la France a traversé une polémique de quelques jours : le drapeau européen a remplacé le drapeau français sous l’Arc de Triomphe. Bien que je ne suis pas persuadé que ce sujet méritait une telle polémique, cela démontre la volonté des fédéralistes (peut-être maladroite), fondre la culture et l’identité françaises dans une culture et une identité européennes.  Or, il n’y a pas d’identité européenne, il y a une culture européenne fondée principalement sur l’attachement à la démocratie, mais cela ne va pas plus loin : il n’y a pas deux modèles sociaux similaires au sein de l’UE, il n’y a pas deux cultures identiques au sein de cet Espace. Nous sommes européens, certes, mais nous sommes aussi français, et il ne faut oublier, ni l’un, ni l’autre. Nicolas Sarkozy avait par ailleurs choisi, lors de la Présidence française de l’Union Européenne en 2008, d’afficher les deux drapeaux européens, français et européens, côte à côte, sous l’arc de Triomphe, ce qui est nettement plus cohérent.  Penser, que toutes les identités culturelles au sein d’une seule entité européenne, est dangereux et cela mène au repli sur soi et donne du grain à moudre aux populistes et aux nationalistes.

Néanmoins, dans d’autres domaines, nous devons pousser l’harmonisation européenne plus loin : il faut un droit d’asile européen,  il faut tendre vers une politique de défense commune,  une politique énergétique commune, une politique des frontières commune (il serait par ailleurs ingénieux de renforcer les moyens de Frontex).

« Nous portons l’exigence d’une Europe plus respectueuse de principe de subsidiarité« 

Le projet d’Emmanuel Macron est dangereux et surtout n’est pas novateur, il considère que la France, doit, avec tous les pays européens, s’engouffrer dans l’Union Européenne, au risque de voir des eurosceptiques, gagner, un jour, les élections européennes. Il est plus que temps de repenser le projet européen, celui d’une Europe plus proche de chaque pays, moins technocratique, qui s’adapte au rythme de chacune des nations. Aujourd’hui, le nouveau président du conseil de l’Union Européenne a pris un choix : celui de poursuivre un élargissement effréné de l’Union Européenne alors que nous n’arrivons pas à réformer une Europe déjà trop nombreuse et celui d’effacer les peuples européens au profit d’un peuple européen, au risque de voir les partis eurosceptiques toujours plus forts et au risque surtout de voir l’arrivée de nouveaux Brexit.  Une petite citation avant de terminer :  « Nous défendons le projet européen comme la voie de la prospérité et de la souveraineté de la France. Mais nous portons l’exigence d’une Europe plus respectueuse de principe de subsidiarité, de l’intérêt collectif des Européens et des choix fondamentaux du peuple français ». Il s’agit d’une citation du manifeste du parti Horizons, créé par Edouard Philippe, ancien premier ministre nommé par Emmanuel Macron…

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