Budget : Comment éviter la banqueroute dans un pays de 70 millions d’incultes ?
C’est le sujet du moment en politique nationale : le budget ! Nous le savons, le débat public a beaucoup tourné autour des annonces de François Bayrou pour économiser 44 milliards d’euros. Ces annonces étaient multiples : fin de l’abattement de 10 % sur les retraites, suppression de deux jours fériés, une réforme des ALD, la réduction du nombre de fonctionnaires, etc… Ces annonces naissent dans un contexte économique d’une grande fragilité pour la France :la dette a dépassé les 3000 milliards d’euros soit 118 % du PIB. La perspective d’un abaissement de la notation financière se fait sentir, alors que la situation politique est explosive, face à des gouvernements successifs qui ne durent plus d’un an et l’incapacité de faire adopter la moindre réforme. Ce lundi 8 Septembre, François Bayrou va demander un vote de confiance, qu’il devrait en toute logique perdre puisque tous les partis d’opposition sont décidés à le faire tomber. Face à l’instabilité politique, la confiance des marchés s’érode et emprunter coûtera plus cher ce qui très concrètement va provoquer une hausse des taux d’intérêts, une incapacité pour l’Etat à financer des investissements face à une charge de la dette qui s’alourdit chaque année dans les dépenses de l’Etat. Dans un premier temps, nous allons d’abord expliquer pourquoi le sujet de la dette publique est effectivement gravissime contrairement à ce qu’affirment certains. Puis, nous allons analyser trois énormités souvent entendues dans les médias ou réseaux sociaux qui permettraient de solutionner le problème de la dette publique, à savoir :baisser les salaires et prétendus « avantages » des élus, taxer les plus riches (en particulier la taxe Zucman) et supprimer les « aides » aux immigrés.
L’urgence de la dette publique

La dette publique est un réel problème, elle ne cesse d’augmenter, elle s’élève à 3000 milliards d’euros, ce qui, comme dit précédemment, représente 118 % du PIB. Même si la France n’a jamais été bonne élève en ce qui concerne la réduction de la dépense publique puisque depuis 1974, jamais un seul budget de l’Etat n’a été à l’équilibre. Pour autant, il y avait un point qui sauvait la France : la stabilité, permise par le système constitutionnel qui favorise les majorités absolues. Or, nous savons tous que depuis 2022 et encore plus depuis 2024, ce n’est plus le cas.
Les conséquences de la chute du gouvernement le 8 Septembre et de l’instabilité qui en résulte sont concrètes : hausse des taux d’intérêts ! Puisque la confiance en la capacité de la France s’érode et à juste titre, emprunter pour l’Etat coûtera plus cher. Ce qui signifie, un ralentissement de la consommation, une difficulté plus importante pour accéder aux crédits : immobilier, prêts étudiants, consommation. Pour l’immobilier, ça signifie qu’il est plus dur d’accéder à la propriété, mais aussi de vendre, c’est donc un ralentissement significatif du marché immobilier. Au niveau macro, l’Etat dédie une plus grande partie de ce budget au remboursement de la dette publique, donc cela réduit sa capacité à financer les investissements de demain : écologie, éducation, innovation, défense…
Quand François Bayrou parle d’un risque de tutelle de FMI, ce n’est pas exagéré. Simplement ce n’est pas un risque immédiat, mais à échelle de cinq ou dix ans peut devenir une réalité, si rien n’est fait. Avant la tutelle de la FMI, il y aura comme la Grèce, si rien n’est fait, une tutelle de la commission européenne qui sera appliquée, avec, à la clef, des réformes nettement plus radicales que la suppression de 2 jours et le déremboursement des cures thermales. Le risque est surtout à moyen terme, car, si rien n’est fait, la perspective d’un défaut de paiement d’un pays comme la France, aurait des conséquences qui dépasseraient sa frontière, ce serait sans doute la fin de la zone euro et peut-être même de l’UE… Ce qui compte, c’est la capacité de la France à montrer qu’elle est capable de rembourser la dette publique.
Tout cela pour dire que oui, François Bayrou a raison de dire que c’est un risque majeur, et que, oui cela va peser sur les futures générations, puisque l’effort pèsera en grande partie sur celles-ci, si rien n’est fait aujourd’hui.
Le top 3 des énormités
Enormité n°1: « il suffit de réduire le salaire des politiques »

C’est sans doute ce qui est le plus entendu dans les médias, les micro-trottoirs, les réseaux sociaux… Il suffirait de baisser le train de vie des élus, comprendre leurs salaires et leurs avantages pour résorber la dette publique.
Comme dit précédemment, la dette publique, c’est 3000 milliards d’euros. L’effort annuel doit être autour de 40 milliards d’euros minimum.
Le salaire des élus, tous confondus, soient, Président de la République, députés, sénateurs, élus locaux, c’est 2,1 milliards d’euros.
Si nous prenons le coût du gouvernement, du sénat et de l’assemblée, soit, salaires+ « avantages » c’est 1,1 milliard d’euros, source : rapport de René Dosière. Il faut savoir, que d’une part, il est impossible de supprimer complètement ces dépenses, puisqu’il faut verser un salaire aux députés, au président de la République, etc… Assez logiquement il faut assurer un minimum de sécurité aux ministres et au président de la République, donc, certaines dépenses comme les gardes du corps sont incompressibles. Au tout au plus, il serait possible d’économiser 1 milliard d’euros. C’est quasi-nul à l’échelle de l’effort global. Il est aussi essentiel de rappeler deux choses :
Premièrement, les élus, ne sont pas « surpayés » contrairement à une légende urbaine, la plupart, des députés, des sénateurs, des ministres (et que dire du Président ?) de par leur parcours, seraient mieux payés (et mieux traités aussi !) dans le privé.
Deuxièmement, il y a un lien qui a été établi entre le niveau de rémunération, ceci pour les fonctionnaires et les élus. Ceci est assez logique, plus la rémunération d’un élu est basse, plus le besoin d’apports financiers extérieur s’avère essentiel. Ceci explique pourquoi les pays aux plus faibles niveaux de vie, donc avec les rémunérations d’élus les plus faibles et les plus proches du niveau de vie moyen, connaissent les taux de corruption les plus élevés.
Enormité n°2: « il suffit de taxer les riches »

Dans la même veine, une autre solution toute aussi populiste et surtout, tout aussi simpliste, est très présente dans les esprits. Celle qui suffirait de taxer les riches. Et la gauche, a déjà trouvé son gourou : un certain gabriel zucman, qui a suggéré une taxe qui permettrait de récupérer, selon lui, entre 15 et 25 milliards d’euros, en taxant de 2 % les patrimoine supérieurs à 100 millions d’euros. Donner une fourchette de recettes aussi large pour estimer les recettes montre déjà l’amateurisme de l’auteur. Il a été estimé que cette fourchette pourrait s’estimer juste, si, il n’y pas un mécanisme de plafonnement fiscal comme c’était le cas pour l’ISF (pas de taxation au-delà de 75 % des revenus de l’année d’avant) et si tout le patrimoine est pris en compte sans distinction : professionnel, immobilier, financier. C’est donc-là tout le problème.
Si le patrimoine professionnel et financier est pris en compte, cela pose deux problèmes majeurs :
- Premièrement, quel revenu est pris en compte : avant ou après impôt ? Dans le cadre du patrimoine professionnel ce n’est pas du tout un détail, car si c’est le revenu avant impôt qui est pris en compte, c’est clairement anticonstitutionnel puisque cela revient à imposer un patrimoine non existant et c’est inconstitutionnel selon plusieurs jurisprudences du conseil constitutionnel.
- Si c’est le revenu après impôt qui est pris alors ça rapporterait 2 milliards d’euros, soit ce que rapportent déjà les augmentations d’impôts décidées par le gouvernement dans le budget précédent, autrement dit, rien…
- Le conseil constitutionnel a déjà dit à propos de l’ISF qu’un impôt sans plafonnement incluant tout type de patrimoine sans distinction est inconstitutionnel.
En clair, cette taxe c’est du vent, et au-delà son inapplicabilité, elle poserait de sérieux problèmes économiques. Le risque n’est pas un exil fiscal massif, mais une désincitation à investir en France. Par ailleurs, Gabriel Zucman affirme que les plus riches paient proportionnellement moins d’impôts que les classes moyennes, ceci est tout simplement faux, comme le démontre une étude de Antoine Lévy ou encore une autre de Sylvain Catherine. Ils démontrent simplement que les calculs mensongers de cet économiste ne prennent pas en compte les transfets sociaux.
Le danger d’un retour de l’ISF

Enfin, croire que la seule solution est de taxer les riches, permet déjà d’éviter de poser la question du fait que la France vive au-dessus de ses moyens depuis les années 1980. Contrairement à ce qu’affirme la gauche, la suppression de l’ISF a eu des effets positifs : le solde d’exil fiscal est positif (plus de retours que de départs) et une plus grande attractivité pour les investisseurs étrangers.
La compétition fiscale est aujourd’hui encore plus féroce, avec la politique fiscale très agressive de Giorgia Meloni en Italie. Croire que l’on peut gagner la bataille de l’emploi, de la compétitivité en augmentant la fiscalité dans un pays à 48 % de prélèvements obligatoires, est une hérésie. Par ailleurs, comme l’a expliqué le CAE, il a été démontré qu’une hausse de la fiscalité du capital peut avoir des effets délétères comme ce fut le cas en Norvège :il a été estimé que pour 1 euro de hausse, cela ne rapportait que 26 centimes. De plus la mise en place de cet impôt a provoqué une perte de recettes de presque 500 millions d’euros. Bref, une réussite !
Enormité n°3 « il suffit de renvoyer les immigrés »

Le troisième argument, et là ça vient du Rassemblement National, c’est qu’il suffit de mettre fin aux prestations dites non contributives (RSA, AAH, minimum vieillesse, etc…) aux étrangers pour renflouer les caisses. Le RN affirme même que cela permettrait de rapporter 18 milliards d’euros ! Il faut savoir que ce chiffre n’a jamais été confirmé par un seul économiste. Il est estimé plutôt que cela rapporterait 6,8 milliards d’euros selon l’Institut Montaigne. Sans compter que ce chiffre ne différencie pas européen et extra-européen, et que ce serait contraire aux traités européens. Le Conseil d’Etat a estimé que la seule mesure légale dans ce registre serait de supprimer pendant cinq ans les prestations non contributives pour les étrangers extra-européens, en clair ce qui était proposé par la loi immigration.
Sans forcément être pour ou contre cette mesure, elle peut être intéressante si comme c’était prévu par la loi immigration, le fait d’avoir un emploi permet d’obtenir les prestations plus rapidement pour un étranger.
Mais ce qui est illusoire, c’est de croire que nous allons résoudre le problème de la dette publique en nous focalisant sur l’immigration. Sans compter que la suppression pure et simple des aides sociales aux étrangers, en plus d’être illégale, poserait des questions sur le financement de notre système de retraite. Cela démontre comme pour LFI, la faiblesse du programme économique du RN, qui promet de raser gratis d’un point de vue fiscal sans apporter la moindre source de financement autre que l’immigration ou baisser la contribution financière à l’UE de la part de la France (ce qui est impossible au vu des traités).
Pour conclure, nous vivons dans un pays inculte en économie
Pour conclure, la cause de la dette publique n’est pas l’immigration, ni le salaire des politiques, ni le niveau de taxation des plus riches. Croire que toucher à un de ces trois leviers va solutionner la dette publique est populiste et surtout mensonger. Comme le dit l’article, nous vivons dans un pays de 70 millions d’incultes, d’ignorants en économie. Qui n’ont aucune notion de la répartition des dépenses de l’Etat. La solution serait de bloquer le pays, comme certains militants d’extrême gauche promettent de le faire le 10 Septembre : mais contre quoi ? Contre la réalité ? Contre le fait que les français collectivement vont devoir faire des efforts ?
Le plus gros effort (mais pas le seul) pour résoudre la dette publique, doit concerner les dépenses sociales, et ça sera l’objet du prochain article. En attendant, une seule question, que je pose souvent : à quand des cours d’économie obligatoires au collège et au lycée ?