Le code du travail : La réforme indispensable
C’était le sujet-phare lors de la campagne présidentielle de 2017, la refonte du code du travail. Le Président Macron en avait fait son pilier de campagne. Il avait promis : « Nous permettrons de négocier au plus près du terrain. Le Code du travail définit un socle de droits et de règles (durée légale du travail, salaire minimum, égalité professionnelle…), qui continuera de s’imposer aux entreprises. Au-delà, la primauté sera donnée aux accords d’entreprise sur les accords de branche. Tout accord d’entreprise résultera soit d’un accord majoritaire avec les syndicats, soit d’un référendum à l’initiative de l’employeur ou des syndicats sur la base d’un accord minoritaire. C’est seulement à défaut d’accord d’entreprise que la branche interviendra. Ainsi, les conditions de travail et les salaires notamment seront négociés au plus près du terrain. »
Les ordonnances Macron
En clair, Emmanuel Macron promettait que le code du travail ne se recentrerait que sur un ensemble de fondamentaux et que tout le reste serait négocié par accord d’entreprise. Encore une promesse non-tenue ! (c’est la combientième déjà ?). Les ordonnances travail, votées en 2017, qui étaient censées être la « Révolution », n’ont en fait, été qu’un flop, un parmi d’autres durant ce quinquennat ! Le bilan est très mitigé : le nombre d’accords signés n’a pas augmenté, la barémisation des indemnités prud’hommales n’a pas été appliquée dans tous les tribunaux. La raison assez simple de l’échec de cette loi est le fait que la loi, donne la possibilité de dialoguer par entreprise, sauf dans la très grande majorité des domaines, notamment les CDD, le CDI de chantier, le salaire minimum, la période d’essai, la durée du travail, le portage salarial… Tout le monde sait que la négociation par branche est d’une pure futilité, le nombre très faible d’accord signés en est la conséquence : le domaine de négociation réservé à l’entreprise est quasiment inexistant et la négociation par branche n’aboutit jamais à rien. D’autres mesures ont été prises : la simplification du compte pénibilité, la fusion des IRP, la simplification des licenciements économiques, la rupture conventionnelle collective, la possibilité de conclure un accord d’entreprise par référendum dans les entreprises de moins de 20 salariés… Tout cela c’est très bien, mais, prenons par exemple, le référendum d’entreprise, pourquoi le restreindre aux entreprises de moins de 20 salariés ? Pourquoi ne pas avoir ouvert le référendum d’entreprise à tous les secteurs ? Mais suis-je bête ! Les syndicats ne voulaient pas ! Cela risquait de torpiller leurs pouvoirs ! Encore une fois, Macron a fait preuve d’un manque de courage déconcertant et n’a pas été capable de tenir tête à ces organisations corporatistes.
Les 35 heures, les grandes absentes
Le sujet complètement absent de cette réforme, et c’est navrant, c’est la durée légale du travail. Emmanuel Macron a d’ores et déjà annoncé qu’il ne reviendrait pas sur les 35 heures en vue de son éventuel second mandat. La question n’est pas de savoir s’il faut travailler plus ou moins, la question c’est que chaque entreprise puise fixer sa durée légale de travail par accord d’entreprise, dans la limite de 48 heures par semaine (règlementation européenne). Nous pourrions très bien fixer un mécanisme consistant à ce qu’une augmentation du temps de travail se traduise par une augmentation de la rémunération. Emmanuel Macron, au début de la campagne de 2017 a eu une idée très originale, qu’il a par la suite réfuté et bien heureusement, celle de moduler le temps de travail en fonction de l’âge. Premièrement, niveau constitutionnel c’est limite, puis, le seul impact qu’aura cette loi c’est de faire bondir le chômage chez les seniors. Cette proposition révélait aussi le caractère particulièrement technocratique parisien d’Emmanuel Macron, qui penserait qu’il faudrait travailler plus ou moins pour tous les secteurs.
Révolution
La loi d’Emmanuel Macron sur le travail s’est donc avérée totalement insuffisante et les résultats parlent d’eux-mêmes. Certaines mesures ont certes, eu un impact bénéfique : la rupture conventionnelle collective et les accords de performance collective. Mais nous sommes très loin de la révolution nécessaire, « Révolution », par ailleurs, c’était le titre de l’essai publié par Jupiter en 2016, où il annonçait les mesures qu’il comptait prendre sous réserve de son élection, citons un extrait : « changer profondément la construction (du) droit du travail et permettre aux accords de branche et aux accords d’entreprise de déroger à la loi par accord majoritaire sur tous les sujets souhaités ». Nous en sommes très loin.
Ce qu’il aurait fallu faire
Ce qu’il aurait fallu faire, c’est un véritable bouleversement du code du travail. Premièrement, il faut une véritable inversion de la hiérarchie des normes, la primauté absolue des accords d’entreprise sur les accords de branche sur tous les domaines. Il faut aussi élargir significativement le champ de la négociation collective : motifs de rupture du contrat de travail ainsi que ses conditions, prévention des risques professionnels, prêt de main d’œuvre, durée légale de travail… Bref, le code du travail ne doit se concentrer que sur les fondamentaux… L’accord d’entreprise doit, par ailleurs, pouvoir primer de manière systématique sur le contrat de travail, en créant notamment un délai de rétractation pour les salariés et si ces derniers s’opposent à l’accord, ils doivent pouvoir être licenciés pour motif personnel, comme c’est déjà le cas en cas de refus des accords de performance collective. Le barème Macron pour les prud’hommes, n’étant pas appliqué, nous pourrions imaginer qu’un employer puisse verser, à titre de solde tout compte, au moment du licenciement, le montant total du plafond pour dommages et intérêts et en contrepartie le salarié ne pourrait pas aller aux prud’hommes.
Pour les licenciements économiques, il faut les simplifier, trois mesures pour cela : la fin des plans sociaux pour les PME, la fin de l’obligation de reclassement (le fait de transférer un salarié à un poste différent en cas de licenciement économique) pour les TPE/PME ; ces deux mesures ne servent à rien, les patrons en viennent à proposer des postes sous-qualifiés à des cadres… Et, il faut mettre fin au contrat de sécurisation professionnelle, un dispositif d’accompagnement des licenciés économiques pendant 1 an qui est un échec : seuls 50 % des bénéficiaires des CSP ont trouvé un emploi à son aboutissement, dont 51 % avec un salaire plus faible. Au lieu de toutes ces mesures chronophages, il faut renforcer significativement les politiques de formation professionnelle, notamment obliger les employeurs à abonder le compte formation des salariés licenciés économiquement. Quelques mesures déjà citées auparavant : la suppression de la durée légale hebdomadaire de travail, l’extension du référendum d’entreprise à toutes les sociétés. Nous pourrions aussi citer le fait que les contrats à temps partiel ne puissent pas avoir une durée inférieure à 24 heures par semaine, ce qui est totalement incohérent et pénalisant, pour les salariés comme pour les entreprises. Il est donc urgent de revenir sur cette mesure, mais Emmanuel Macron ne le fera pas, puisque la loi fixant ce minimum a été établie en 2013 et il était conseiller économique du gouvernement à ce moment.
Une flexisécurité à la Française

Il nous faut une véritable flexisécurité à la française, pour cela, il faut complètement repenser notre politique de formation : la décentraliser, la recentrer sur ceux qui en ont le plus besoin. Il faut développer massivement l’alternance, et ne pas faire la politique des petits-pas qui a été celle d’Emmanuel Macron à ce sujet. Tout cela, c’est un autre sujet, pour autant, ça devrait être le ciment de notre modèle social : une régulation minimale sur le marché du travail mais un important dispositif de formation, afin de favoriser la mobilité qui est aujourd’hui le souhait de la majorité des salariés. Qui osera ? Un seul programme se rapproche le plus de toutes les propositions édictées précédemment, celui de Valérie Pécresse : elle propose de recentrer le code du travail sur ce qui relève de l’ordre public absolu et de confier le reste aux accords d’entreprise, elle propose de supprimer la durée légale hebdomadaire de travail…