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Ukraine : la guerre est déclarée, quels enjeux ?

Depuis plusieurs mois, les tensions entre l’Ukraine et la Russie ont été à leur paroxysme. Alors que la possible invasion de l’Ukraine par Vladimir Poutine se faisait entrevoir depuis plusieurs semaines,  tout s’est accéléré très vite. Lundi 21 Février, Vladimir Poutine reconnaît l’indépendance des régions séparatistes dans le Donbass. Jeudi 24 Février au matin, le Président Russe a annoncé vouloir envahir l’Ukraine en commençant par les régions de l’Est, pro-russes. Depuis, la guerre n’a fait que s’intensifier, chaque jour, des civils Ukrainiens, innocents, meurent. Chaque jour tous les Ukrainiens ont les yeux rivés sur l’avenir de leur pays et résistent à l’envahisseur. Nous pouvons observer que ce peuple est particulièrement résistant, personne ne pensait que la capitale Ukrainienne, à la date du 2 mars, serait encore debout. Néanmoins, il est évident que, non sans difficulté,  la Russie parviendra à mettre la main sur l’Ukraine, mais occuper un pays de 44 millions en très grande majorité hostile à la Russie risque de s’avérer intenable, surtout que les Ukrainiens ont montré de quoi ils sont capables.  Néanmoins, cette crise a provoqué le retour de la guerre réelle en Europe et à 2 heures en avion de Paris. Le continent européen, se retrouve confronté à nouveau à la guerre sur son territoire, chose n’étant pas arrivée depuis 1945.

Les trois oracles

Nous pouvons souligner l’incroyable force de prédiction de nos trois intellectuels de la présidentielle : Marine Le Pen, Eric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon.

  • « évidemment, je ne souhaite pas que la Russie envahisse l’Ukraine, je pense d’ailleurs que la Russie non plus ne le veut pas », 2 Février 2022, « Je vous prends le pari, la Russie n’envahira pas l’Ukraine », Eric Zemmour 9 décembre 2021
  • « Je ne crois pas du tout, je ne vois pas ce que feraient les Russes en Ukraine », Marine le Pen, 7 février 2022
  • « La menace n’existe même pas », 30 Janvier 2022, Jean-Luc Mélenchon

Il ne faut pas oublier que ces trois oracles ont toujours été d’importants soutiens de Vladimir  Poutine

  • « Je rêve d’un poutine français », Eric Zemmour
  • « La Russie est un partenaire », Jean-Luc Mélenchon
  • Marine Le Pen avait carrément choisi d’utiliser une photo où l’on voit la frontiste serrer la main à son ami Russe sur son tract de campagne

N’accordons pas plus d’importance à ces trois clowns, d’autant plus à l’heure où au moins 350 civils Ukrainiens sont morts, il serait en revanche bon que tous les électeurs du trio Zemmour-Le Pen- Mélenchon prennent conscience, à travers cette histoire, du vrai visage de ceux qu’ils sont prêts à porter au pouvoir.

Une crise révélatrice des forces et des faiblesses de nos organisations internationales

L’ONU

La guerre est déclarée, elle est de retour, et, Poutine ne s’arrêtera pas à l’Ukraine, s’il parvient à la conquérir, il est probable que sa prochaine cible en vue, soient les Pays Baltes, en revanche, il paraît peu probable qu’il s’en prenne à la Pologne, puisque celle-ci fait partie de l’OTAN et cela provoquerait une réplique des pays membres de l’organisation.  Nicolas Sarkozy a fait un constat, malheureusement réel, les institutions internationales ne fonctionnent pas. Bien qu’il n’est pas opportun en ce moment de repenser l’organisation de la politique internationale,  il faudra mettre le sujet sur la table à un moment donné. Il est évident que l’ONU, telle que pensée aujourd’hui, est victime de son organisation anachronique avec un conseil de sécurité qui ne reflète plus du tout la géopolitique actuelle.  L’Allemagne n’est pas membre permanent  de ce conseil puisqu’elle ne faisait partie des vainqueurs en 45, la Russie en revanche, en fait partie. Logiquement, cette situation bloque toute intervention de l’ONU, puisque la Russie applique de manière systématique son veto et surtout, aujourd’hui, parmi les pays les plus dangereux pour la démocratie, nous pouvons considérer que la Russie représente un danger légèrement plus important que l’Allemagne.

L’OTAN

En revanche, contrairement à ce que pensent les extrêmes, plus que jamais, il est vital de renforcer l’OTAN et surtout de faire partie de l’OTAN, car c’est cette organisation qui peut nous assurer une protection si demain la France était victime d’une agression Russe. Quitter l’OTAN ou l’Union Européenne, dans le contexte actuel, serait complètement suicidaire.  Les extrêmes n’aiment pas l’OTAN, à la droite de la droite, on considère qu’il vaut mieux se rapprocher du modèle autoritaire Russe que de la démocratie libérale américaine.  A la gauche de la gauche (et aussi à l’extrême droite cela dit), on considère qu’il vaut mieux se rapprocher de la Russie pour s’éloigner des Etats-Unis, qui ne serait que des expansionnistes et des méchants capitalistes, alors que Vladimir Poutine est très gentil et n’est absolument pas dans un esprit belliqueux. Quel est le dirigeant, qui aujourd’hui, envahit son voisin et a mis en alerte l’arme nucléaire : Joe Biden ou Vladimir Poutine ? Est-ce que les Etats-Unis, depuis leur création, ont  envahi, ne serait-ce qu’un seul pays ? Beaucoup continuent à penser, que si l’OTAN ne s’était  étendu jusqu’en Ukraine, il n’y aurait pas eu de guerre. Premièrement, il est évident que Vladimir Poutine a saisi l’argument de l’OTAN pour choisir d’envahir l’Ukraine, mais cela fait longtemps qu’il songeait à une offensive et il aurait tout à fait pu trouver une autre raison de passer à l’action. Surtout, le seul pays qui est en mesure de décider si l’Ukraine doit adhérer à l’OTAN, il est souverain, il s’appelle l’Ukraine, ce n’est pas à la Russie, aux Etats-Unis ou à la France de choisir pour eux, d’autant plus qu’il est tout à fait compréhensible qu’un pays qui a pour voisin Vladimir Poutine ait envie de bénéficier d’une protection militaire garantie par une organisation internationale.

L’Union Européenne

Autre point central,  l’Union Européenne. Cette crise met en exergue les faiblesses du modèle européen tel qu’il existe aujourd’hui : pas de défense commune, pas de politique énergétique commune ce qui accroît la dépendance de certains pays à l’égard des Russes dans ce domaine, et surtout, pas de gouvernance de l’Europe, ce qui l’empêche de peser sur la scène internationale. Il est donc urgent, de définir, sans aller jusqu’à l’armée européenne, a minima, une politique de défense commune.  Il faut une Europe réellement forte à plusieurs vitesses, qui permette aux pays les plus intégrés de parler au nom d’une seule voix, au sein des organisations internationales. Il faut que les orientations énergétiques soient harmonisées pour faire face aux prochains enjeux : géopolitiques mais aussi écologiques, car, aujourd’hui, l’Allemagne paie les conséquences des choix qui ont été faits, ces dernières années, dans ce pays, en matière énergétique.  Seule une Europe forte pourra s’imposer sur la scène diplomatique, mais pour une Europe forte, il faut bousculer ce modèle et trouver une alternative entre l’Europe des nations, qui n’est plus viable actuellement, et l’Europe fédérale, qui n’aboutira jamais : elle existe, ça s’appelle une Europe à plusieurs vitesses. Il nous faut une Europe diversifiée, à la carte, capable de mettre fin aux blocages institutionnels et de coopérer davantage avec les pays prêts à le faire (et notamment les six pays fondateurs).

Les réfugiés Ukrainiens

Et bien évidemment, le prochain défi, auxquels seront confrontés tous les pays européens, dans les jours qui viennent, sera l’accueil des réfugiés Ukrainiens. Nous le pouvons et nous le devons, ils sont européens et, surtout, ils fuient la guerre.  Par ailleurs à l’exception de Zemmour, tous les candidats à la présidentielle se sont accordés pour l’accueil de réfugiés ukrainiens, le polémiste justifiant : « je pense simplement qu’il n’est pas bon d’arracher les gens comme ça loin de leur pays, ni de déstabiliser la France, qui est déjà submergée par l’immigration ». D’une part, comme dit au-dessus,  Kiev est à 2 heures d’avion de Paris, donc l’argument du pays lointain ne tient pas la route, et surtout, le statut de réfugié est réservé, initialement, à ceux fuyant la guerre, le détournement du droit d’asile cela existe, mais ce n’est pas le cas ici, nous avons, face à nous, de vrais réfugiés. Zemmour sous-entend, qu’il faudrait mieux que ces Ukrainiens se battent dans leur pays plutôt que de fuir, sur certains blogs, on parle de déserteurs, une question : que feraient-ils à leur place ? Surtout, qu’aujourd’hui, ce ne sont plus  des hommes qui quittent l’Ukraine puisque ceux-ci n’ont plus le droit de partir et doivent combattre aux côtés de l’armée Ukrainienne.

« Vladimir Poutine a ressuscité l’OTAN »

Voilà le procès qui peut être fait aux institutions européennes et internationales. Le 24 Février, peut-être sans le vouloir, Vladimir Poutine a ressuscité l’OTAN, il est en train de renforcer cette organisation et surtout, il donne envie aux pays non-membres d’y adhérer. L’OTAN ne sortira plus forte que cette guerre. Et surtout, ce conflit montre néanmoins la puissance économique de l’Union Européenne, qui a su, en quelques jours seulement, entreprendre des sanctions économiques et financières jamais vues et inimaginables. Qui aurait pensé que l’Allemagne, très dépendante du gaz russe, accepte de se coordonner avec le reste des pays européens ? L’Europe a su montrer sa capacité de cohésion, et plus que cela, tout l’Occident a montré sa capacité à entreprendre des sanctions dans tous les domaines, y compris le sport. Aujourd’hui, l’économie Russe est en train de s’effondrer (malheureusement au détriment de la population Russe mais aussi des oligarques ce qui déstabilise le Kremlin). Une mobilisation générale a été organisée dans tout l’Occident et dans tous les secteurs. Une Europe capable de s’unir à ce point face à une guerre était le rêve de Robert Schumann, aujourd’hui, les européens l’ont fait.  Ceci est donc une belle leçon aux populistes et aux nationalistes.

Ce que nous pouvons en retenir, c’est que, plus que jamais, cette crise montre la nécessité, pour la France, de faire partie d’organisations internationales, elle montre la nécessité d’une Union Européenne qui doit considérablement se renforcer et tendre vers des politiques communes. Tout simplement, aujourd’hui, c’est devenu un gros mot, et pourtant, il ne faut pas avoir peur de se revendiquer atlantiste, il ne faut pas avoir peur de se revendiquer européiste et surtout, il ne faut pas avoir peur de se dire mondialiste.

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