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Beauvau de la sécurité : le big-bang de la police…. Vraiment ?

Un Beauvau… pourquoi faire ?

Le 15 Septembre dernier, Emmanuel Macron nous a annoncé les différentes mesures issues du « Beauvau de la sécurité », une vaste concertation avec les policiers pour convenir de différentes nouvelles réformes dans l’objectif, initial, de mieux protéger les forces de l’ordre. Tout d’abord, qu’est-ce que le Beauvau de la sécurité ? C’est donc une réunion organisée par le gouvernement Castex, avec, comme principal intervenant, Gérald Darmanin, mais pas seulement, également le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti. A première vue, nous pouvons nous demander pourquoi une telle réunion qui a pour objectif de programmer la politique de sécurité n’a lieu qu’en fin de quinquennat, pourquoi avoir attendu 2021 pour agir ? Emmanuel Macron se serait-il réveillé en 2021 en prenant conscience (enfin ?), de l’insécurité en France ? Initialement, cette vaste réunion devait déboucher sur une « vaste loi de programmation de la sécurité intérieure » (pour reprendre les termes de Gérald Darmanin), pour autant, le gouvernement a laissé entendre que cette loi ne serait pas votée avant mai 2022, ainsi, Emmanuel Macron, sous sa présidence, n’aura pas fait voter de loi sur la sécurité, ce qui n’était jamais arrivé durant la Vème République. Le Président de la République, en dépit de toute loi, a donc présenté quelques mesures, tout en se présentant comme le Président qui a fait le plus pour lutter contre l’insécurité, plutôt étonnant, pour celui qui parlait de « sentiment d’insécurité » il y a encore quelques mois. Par ailleurs, il est fort étonnant de constater également que quand un élu de droite attaque le gouvernement sur ce sujet, les ministres, les députés ou les militants LREM ne font que répondre, comme des boites à meuh, que « Nicolas Sarkozy a supprimé 12 000 postes dans les forces de l’ordre ». Il faut bien comprendre que c’est le seul et unique argument de la majorité, d’ailleurs, peut-être que le programme d’Emmanuel Macron sera celui-ci « de toute façon je suis le meilleur puisque la droite a supprimé 12 000 postes dans la police », qui sait ? En tous cas, j’invite sincèrement les lecteurs à regarder un jour, un débat entre un militant LREM et une personnalité de droite sur la sécurité, vous aurez l’occasion de constater la bassesse de l’argumentaire LREM qui ne repose que sur un seul argument.

En attendant, rentrons dans les faits et examinons les mesures, annoncées par le Président de la République, quelles sont-elles ?

  • Un budget supplémentaire de 1,5 milliards d’euros
  • La simplification de la procédure pénale
  • Les rapports de l’IGPN (inspection générale de la police nationale) et IGGN (inspection générale de la gendarmerie nationale) rendu publics
  • La fin des rappels à la loi
  • La création d’amendes forfaitaires pénales pour l’occupation illicite de terrains
  • Le doublement sur dix ans de la présence policière sur le terrain d’ici 10 ans
  • Un « polo modernisé » (avec un calot au lieu d’une casquette !)

Je trouve, tout de même, assez étonnant qu’un Président de la République ait l’idée de répondre à une volonté des policiers, d’être, mieux reconnus, mieux protégés, par…. Un nouvel uniforme…

Tout n’est pas à nier dans les annonces , l’augmentation du budget, c’est une bonne chose, encore, faut-il savoir ce que l’on fait de ce budget, aujourd’hui, la priorité ça doit être le réarmement de nos forces de l’ordre.  Le fait que les rapports de l’IGPN et de l’IGGN soient rendus publics posent de vraies questions, est-ce que les noms des policiers mis en cause seront, eux aussi, rendus publics ? Auquel cas, ce serait extrêmement grave, cela mettrait fin à la protection du policier en tant que garant de la sécurité. Ou alors, parle-t-il des rapports annuels d’activité de l’IGPN, et, ceux-ci sont déjà publics ! Dans ce cas, aucun effet d’annonce.

La simplification de la procédure pénale, c’est assez intéressant à première vue, encore faudrait-il que le gouvernement apporte des précisions. Emmanuel Macron nous a annoncé le calendrier : dans quelques semaines vont s’ouvrir les Etats généraux de la justice, la réunion des parlementaires, tout cela devrait déboucher sur de nouvelles mesures. Le problème étant que nous sommes en Septembre 2021 et que le mandat d’Emmanuel Macron prend fin dans 7 mois, et qu’au-delà de 2021, il sera difficile de réformer, donc le président de la République espère pondre en trois mois une loi visant à simplifier la procédure pénale le tout, après une réunion de tous les parlementaires et représentants des professions de la justice… C’est techniquement impossible. La fin des rappels à la loi, le Président de la République l’a présenté comme une révolution, et c’en est une, sauf que ce n’est pas une annonce, c’était déjà un fait depuis l’adoption de la loi visant à restaurer la confiance dans l’institution judiciaire, votée il y a quelques mois, en soit, rien de nouveau donc. La création d’amendes forfaitaires pour l’occupation illicite de terrains, c’est bien, c’est une bonne mesure, encore faudrait-il revenir, en priorité, sur ce fameux délai de 48 heures, au-delà duquel le « flagrant délit » ne s’applique plus.

En soit, nous voyons très clairement que nous avons affaire à de la répétition, un gouvernement qui prend quelques mesures, mais qui, pour la plupart, ne changent rien.

Soyons cependant lucides, concrètement, qu’est-ce qu’aurait pu être un vrai Beauvau de la sécurité ?

Par exemple,  Emmanuel Macron annonce qu’il va « doubler d’ici 10 ans, la présence policière sur le terrain ». Premièrement, il est tout à fait compréhensible qu’Emmanuel Macron ne s’engage pas réellement sur cette mesure puisqu’il sait très bien qu’il ne sera plus Président d’ici 10 ans, à moins qu’il ait déjà envisagé de perdre la prochaine présidentielle… Soyons honnête, le véritable problème expliquant la faible présence policière sur le terrain est le fait que celle-ci soit trop occupée aux tâches administratives. La solution est alors simple, pourquoi ne pas créer une police privée, gérée donc par des sociétés privées, chargée exclusivement des tâches administratives ? Ce serait une vraie révolution qui permettrait de redéployer réellement les effectifs.

Nous sommes aujourd’hui en 2021, Le Président de la République n’a même pas évoqué le cas de la police prédictive pourtant plus que nécessaire, encore plus à l’heure à laquelle on nous annonce une éventuelle hausse du risque terroriste. Et donc, pourquoi ne pas confier cette tâche à l’intelligence artificielle ? Cela a été testé dans différents pays (comme les Etats-Unis) avec un franc succès.

la police prédictive pourtant plus que nécessaire, encore plus à l’heure à laquelle on nous annonce une éventuelle hausse du risque terroriste. Et donc, pourquoi ne pas confier cette tâche à l’intelligence artificielle ? Cela a été testé dans différents pays (comme les Etats-Unis) avec un franc succès.

Et enfin, le ministre de l’intérieur et le gouvernement dans sa globalité ont refusé catégoriquement d’interroger la justice et donc la politique pénale. Par exemple, une revendication revient régulièrement, celle des peines plancher. Aujourd’hui, il est difficile de vraiment connaître l’efficacité d’une telle mesure, peut-être est-ce efficace. La meilleure façon de connaître l’efficacité d’un tel dispositif serait d’avoir des chiffres sur des longues périodes, ce qui n’est pas le cas, puisque les peines plancher ont été appliquées entre 2007 et 2014 en France. Il serait donc plus judicieux de comparer avec les pays qui l’appliquent : le Royaume-Uni, les Etats-Unis et le Canada, l’Allemagne, l’Italie. Aujourd’hui, aucune comparaison n’est due, mais sincèrement, est-ce qu’il est normal, aujourd’hui, qu’un individu agressant volontairement, puisse en pas passer par la case prison ? La réponse est assez évidente. Si on refuse de mettre en œuvre les peines plancher. Un événement a choqué beaucoup de policiers (et pas seulement), c’est le procès qui a récemment eut lieu visant à condamner des individus à Viry-Chatillon qui ont, décidé de brûler des policiers. Parmi les 16 agresseurs, seulement 5 ont été condamnés. Les policiers étaient indignés et n’avaient pas la possibilité de faire appel puisqu’en France, une victime ne peut faire appel que sur l’indemnisation qu’elle perçoit. Il me paraît donc aujourd’hui légitime, et non pas uniquement dans le cas des policiers, de mettre en œuvre un droit d’appel de la victime, une revendication qui est assez vieille et qui pourrait permettre de vraiment restaurer un lien entre la population et la justice et plus particulièrement entre la police et la justice. Comment peut-on vouloir garantir une transparence de la justice sans que celle-ci puisse être mise en cause ?

En soit, si les annonces faites par Emmanuel Macron sont pour la plupart assez intéressantes, elles dont déjà, fortement insuffisantes, trop vagues, et surtout, elles ne sont pas datées, en tous cas, elles auront lieu au-delà de 2022, donc, après la fin du mandat d’Emmanuel Macron.

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